radars de Nice

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Les voies pénétrant dans une grande agglomération et supportant un trafic élevé posent un problème particulier, celui de la transition entre la zone non urbaine et l'endroit à partir duquel il faudra respecter le 50 km/h. Le problème existait déjà avant les radars automatiques '"nouvelle formule", mais il se pose sur un jour nouveau depuis que la tolérance a été abaissée à 5 km/h. Souvent ces entrées d'agglomération sont bordées de grandes surfaces ou de zones industrielles qui s'étendent progressivement et se révèlent particulièrement dangereuses du fait des nombreuses entrées vers les parking de ces entreprises. Ce n'est pas le cas sur la promenade des Anglais entre le pont sur le Var et le centre de Nice et le problème posé est particulièrement intéressant car il est très "pur". De même la voie dite rapide qui traverse la ville entre l'autoroute qui la contourne et la promenade des anglais en bordure de mer est un cas intéressant de fausse autoroute urbaine, rappelant le périphérique parisien en plus dangereux, la partie autoroutière qui contourne Nice pose un problème plus classique d'autoroute sinueuse avec des dénivelées et des tunnels dans une zone de collines séparées par de petites vallées profondes.

Nice Matin présentait le problème de la façon suivante dans son numéro du 3 janvier 2004 qui commentait ces trois emplacements de radars dans et autour de Nice. La partie du texte citée suit les commentaires d'un gendarme du peloton autoroutier de Saint Isidore sur le premier de ces radars placés sur l'autoroute A8 à hauteur du tunnel de las Planas (limitation à 70) :

"Bien que le secteur où il se trouve soit réellement accidentogène, il est permis de se demander si en condition normale de circulation et dans un trafic fluide, la limitation de 70 km/h qui y est imposée n'est pas excessive. La remarque vaut au moins autant pour plusieurs autres grands axes routiers de la Côte d'Azur : on pense en particulier à la limite de 50 km/h sur la quatre voies qui précède l'entrée ouest de Nice, à Ferber, où les mêmes 50 km/h qui obligent (presque) à rouler avec le frein à main sur la voie dite rapide (article de Michel Barelli). Nice Matin a sollicité ensuite l'avis de ses lecteurs sur ce problème avec le titre suivant : "les limitations de vitesse sont-elles adaptées". Ce texte rappelait justement que "la vitesse - avec l'alcool - est l'une des principales causes de mortalité sur les routes", commentait favorablement le fait que la sécurité routière soit une priorité gouvernementale, avec les résultats favorables que l'on connaît, mais il perdait toute neutralité en utilisant les phrases suivantes : "Eviter que la promenade des Anglais à Nice ne soit prise par des automobilistes inconscients, surtout la nuit, comme un autodrome, c'est bien. La confiner à 50 km/h paraît anormal" et plus loin " La sévérité pour les automobilistes inconscients est une chose. Des mesures quasiment inapplicables en est une autre. Donnez-nous votre avis. Indiquez nous les points où faire l'escargot est hors-norme. Réagissez en nous écrivant sans perdre de vue la sécurité et ce constat : la vitesse tue."

J'ai adressé au Journal la réponse suivante :

Vous demandez l’avis de vos lecteurs sur le réglage des radars automatiques en leur donnant votre réponse avant d’avoir entendu la leur, ce qui ne correspond pas à une « bonne pratique » de consultation. Vous ne pouvez parler « de mesures quasiment inapplicables » alors qu’elles sont déjà appliquées strictement dans de nombreux pays qui ont de meilleurs résultats que nous dans le domaine de la sécurité routière, malgré les progrès extraordinaires obtenus depuis 18 mois par la politique du Gouvernement. En Hollande (qui a mis en œuvre plus de 4000 radars), ou en Grande Bretagne, les seuils de tolérance entre les vitesses maximales indiquées sur les routes et les vitesses sanctionnées ne sont pas supérieurs à ceux retenus par la France, et les limites à 50 km/h en agglomération, y compris sur de grands boulevards équivalant à la Prom, sont respectées.

Quand un tronçon d’autoroute s’est révélé particulièrement dangereux (contournement de Nice au niveau du tunnel de Las Planas) vouloir faire intervenir la fluidité du trafic comme le suggère Michel Barelli dans votre édition du 3 janvier n’est pas réalisable en pratique. Une limite de vitesse doit être stable pour induire des habitudes chez les usagers d’une voie, d’autre part c’est justement quand la circulation est fluide sur une autoroute que les accidents surviennent. Les usagers sont tentés d’accroître leur vitesse et c’est alors qu’une manœuvre inadaptée, un déboîtement sans précaution au moment où un véhicule allait doubler, ou l’arrivée à une vitesse excessive sur un ralentissement, provoque l’accident. Le choix de la vitesse maximale sur une telle zone ne peut se faire qu’entre 70 et 90 km/h. Quand le trafic est très dense les vitesses sont obligatoirement faibles et ce n’est pas à ce moment là que l’on observe les accidents graves sur autoroute.

Pour la Prom la situation est beaucoup plus simple, il n’y a pas d’autre choix possible que le 50 km/h car c’est un boulevard urbain avec du stationnement, de nombreuses intersections marquées par des feux, des changements de files pour quitter la voie par la gauche dans le sens Ouest/Est, avec en outre une fréquentation importante par des usagers étrangers à la région. Il faut également penser au bruit qui est très influencé par la vitesse. Le seul problème est de définir la fin de la zone à 70 et le début de la zone à 50, elle ne peut que se situer à l’approche du premier carrefour après l’aéroport, c'est-à-dire à Ferber. L’efficacité maximale conduirait à placer un radar à la fin du pont sur le Var, réglé à 76 km/h (70 + tolérance de 5 km/h) orienté vers l’arrière des véhicules pour concerner les motos, et un radar réglé à 56 km/h à Ferber.

Sur la voie dite rapide, très accidentogène du fait des entrées et sorties de voies, des cisaillements de circulation et de la tendance des automobilistes à slalomer entre les voies pour gagner quelques secondes, le 50 actuel pourrait être converti en 70 s’il y avait un radar à l’entrée de la voie dans chaque sens, et des radars mobiles à un endroit quelconque permettant de garantir le respect de cette vitesse maximale, mais cela ne pourra pas être fait dans un premier temps pour des raisons financières. D’autre part il est impossible d’envisager des radars mobiles dans des véhicules banalisés arrêtés sur une voie qui ne dispose pas d’une bande d’arrêt d’urgence. Il est tout au plus envisageable de faire des contrôles avec des radars embarqués dans des voitures se déplaçant dans le flux de circulation, et dans ce cas la tolérance sur les vitesses est nécessairement plus élevée, donc l’efficacité des contrôles plus faible.

Tous les sondages effectués depuis la mise en service des radars automatisés mettent en évidence une adhésion profonde de la population à la politique de pacification des routes conduite par le Gouvernement. Elle ne met pas en cause la liberté de se déplacer avec une voiture individuelle, mais vise à donner de nouvelles habitudes aux usagers de la route, en modifiant notamment leur relation avec la vitesse excessive qui fait gagner quelques minutes sur un trajet en accroissant considérablement les risques. Le problème de la circulation à Nice ne sera pas réglé en allant plus vite, au contraire, c’est à 50 km/h que le débit de véhicules sur une voie est le plus élevé, au-delà les distances entre véhicules augmentent plus vite que la vitesse et le débit se réduit. La géographie physique et humaine de la ville est très défavorable au développement de la circulation automobile dans de bonnes conditions. Je ne partage donc pas l’optimisme du maire envisageant la fluidité pour 2006 grâce aux modifications des voies actuelles ou à la création de nouvelles voies. La fluidité du trafic dans une agglomération telle que Nice, coincée entre la mer et la montagne (c’est un de ses charmes !), avec son urbanisation, ses petites routes qui descendent des collines, ne peut être obtenue que par l’accroissement de la surface des voies utilisée par des véhicules en circulation, donc par la réduction du stationnement autorisé, notamment du stationnement prolongé gratuit, et par la disparition du stationnement en double file qui est une plaie niçoise parfaitement contrôlable par la sanction. Vous indiquez 2500 PV par mois pour stationnement en double file (Nice-Matin du 8 janvier 2004), et sur le seul Bd de la Madeleine j’ai déjà compté plus de 50 véhicules en double file, il y a chaque jour plusieurs milliers de véhicules qui commettent cette infraction qui réduit par deux le débit de véhicules sur de nombreuses voies. Le risque d’être sanctionné n’est donc pas à un niveau dissuasif actuellement. Bien entendu il faut également poursuivre le développement des transports en commun, en améliorant la protection des voies réservées au bus comme cela a été fait rue de France, voire en leur réservant la circulation dans certaines voies. Ce combat pour la fluidité ne peut être gagné sans contraintes. L’usage excessif de l’automobile et le stationnement n’importe où et n’importe comment conduit à la paralysie, il faut circuler et stationner moins pour circuler et stationner plus facilement. Toutes les grandes villes sont confrontées à ce choix.