emplacement des radars

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Où placer les radars des contrôles automatisés ?

Les radars étant installés sur des voies et non sur des véhicules, la notion de mortalité au kilomètre parcouru est inappropriée puisqu’il s’agit d’une référence liée au véhicule, le bon indicateur est la mortalité au kilomètre de voie. Si une route présente un risque au kilomètre parcouru quatre fois plus faible qu’une autre voie, mais supporte un trafic dix fois plus important, il y a plus de vies à sauver sur le kilomètre de voie le plus sur mais le plus utilisé. Le périphérique parisien est un bon exemple pour illustrer cette notion, il s’agit d’une voie de type autoroutière, sans intersection ni feux, mais avec des particularités, notamment l’absence de bande d’arrêt d’urgence et le nombre élevé de bretelles de raccordement avec priorité aux véhicules qui entrent sur le périphérique. En prenant en compte la mortalité cumulée au cours des quatre dernières années il y a eu un tué sur chaque kilomètre de cette voie très empruntée. C’est un des taux de mortalité au kilomètre de voie le plus élevé observé en France et pourtant cette voie n’est pas dangereuse si l’on rapporte la mortalité au nombre de kilomètres parcourus par les véhicules qui l’empruntent. Il s’agit donc d’une voie à équiper prioritairement.

Le problème peut-être comparé à celui de la surveillance des plages par des maîtres nageurs sauveteurs. Il est plus important de les concentrer sur les plages peu dangereuses mais noires de monde, que sur les plages moins fréquentées mais proportionnellement plus dangereuses si l’on exprimait le risque par le nombre de baigneurs noyés chaque année rapporté au nombre de bains pris et non par le nombre total de noyés à cet endroit. Cette erreur de référence est fréquente dans des interventions de sécurité sanitaire, la tendance naturelle étant de privilégier le risque élevé par référence à l’individu concerné (ou à sa voiture !) et non par rapport à une référence collective (l’ensemble des usagers qui emprunte une route). En prévention il faut tenir compte du risque individuel multiplié par le nombre de personnes exposées au risque considéré, là où l’intervention sera conduite.

Le réseau communal a 600 000 km de voies et 1221 personnes s’y sont tuées en 2002 soit environ 1 tué par 500 km de voie (1/491), ce n’est évidemment pas là qu’il faut placer des radars !

Le réseau départemental est lui aussi très long, 360 000 km et c’est à son niveau qu’il y a le nombre de tués le plus élevé, 3738 personnes, mais là encore le kilométrage à surveiller pour observer ou prévenir un décès est très élevé, 1 tué pour 100 km (1/96,3) bien que l’efficacité d’une dissuasion soit cinq fois plus élevée au kilomètre de voie que sur le réseau communal. Quand les radars automatisés mobiles seront disponibles, il sera utile de les déplacer sur ce réseau pour exercer une dissuasion crédible sur cette longueur de voies considérable.

L’efficacité la plus importante pour chaque équipement est sur les trois autres types de voies et ce sont bien sur elles qu’il fallait placer les premiers radars pour utiliser au mieux cette dissuasion.

Les autoroutes de liaison mesurent 7578 km et les 328 tués de 2002 représentent 1 tué pour 23 km de voies, c’est quatre fois plus de victimes au kilomètre que sur le réseau départemental et 20 fois plus que sur le réseau communal.

Les autoroutes de dégagement ou plus précisément les autoroutes non concédées mesurent 2456 km et 165 personnes y ont trouvé la mort en 2002 soit un tué pour 15 km de voies.

Les routes nationales ont une caractéristique de mortalité au kilomètre de voie pratiquement identique avec 26050 km et 1790 tués soit un tué pour 15 km (1/14,55).

La priorité est donc d’équiper d’abord les autoroutes et les routes nationales, puis les départementales en sélectionnant celles qui ont le nombre le plus élevé de tués au kilomètre de voie. Le problème des départementales supportant une faible circulation et des réseaux urbains relève de radars automatiques mobiles qui représenteront à terme 30% des équipements et assureront l’extension de la dissuasion à tout le réseau.

La confusion dans les références à propos de l’implantation des radars est favorisée par un concept très implanté dans la conscience des usagers, celui de « point noir ». Le terme désigne une zone limitée sur laquelle les accidents sont nombreux du fait des caractéristiques physiques de cette zone et du trafic qu’elle supporte. Cette notion a dominé les préoccupations des directions de l’équipement pendant plusieurs décennies et des solutions ont été apportées aux problèmes posés. Du fait de ces progrès de la voirie, notamment les aménagements des intersections, la notion de point noir appartient en grande partie au passé, elle doit être remplacée par la notion d’itinéraires dangereux parce qu’ils supportent un trafic élevé sans avoir les caractéristiques des voies autoroutières, c'est-à-dire sans minimiser le risque au kilomètre parcouru. Les voies sur lesquelles chaque kilomètre tue beaucoup, produisent ce résultat avant tout parce qu’elles supportent un trafic élevé et non parce qu’elles sont constituées d’une succession de points noirs. Les accidents surviennent de façon aléatoire tout au long de ces voies. Leur surveillance prioritaire est non seulement un impératif « épidémiologique », mais elle a aussi un caractère pédagogique, elle permet de redonner le sens du respect des limitations de vitesse au grand nombre d’usagers qui les utilisent.

Conclusions

La référence pour implanter des radars automatiques n’est pas la mortalité ou l’accidentalité au kilomètre parcouru mais au kilomètre de voie.

Il serait utile que les cartes de l’accidentalité des années précédentes soient accessibles au niveau départemental sur des sites internet pour convaincre les usagers du bien fondé des choix effectués.