prévention et répression

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Le CSA est un nouvel exemple de la priorité donnée à la sanction dans notre pays aux dépens de la prévention par l'information et l'éducation.

Ce type de critique "plait", il est tellement plus satisfaisant d'imaginer une collectivité d'individus éduqués, informés et responsables qu'un Etat policier où seule la peur du gendarme maintient la population dans le droit chemin. Elle repose sur un premier contre sens, la répression et la prévention ne sont pas mutuellement exclusives, ce qui vient de se passer en France au cours de l'année 2003 est une preuve de l'efficacité de la prévention des accidents par un accroissement de la crédibilité de la répression. Ce ne sont pas les modifications des véhicules et de l'infrastructure qui ont modifié la situation, l'action sur ces deux éléments ne pouvant porter ses fruits que sur le long terme. Il est également difficile d'attribuer ces résultats à une "prise de conscience" soudaine de la gravité du problème, c'est bien l'annonce d'une priorité gouvernementale traduite dans les faits par un ensemble de mesures concernant le dispositif de répression qui s'est révélé efficace et a prévenu la survenue de milliers d'accidents.

Dans le contexte de la sécurité routière, il faut distinguer deux types de prévention par une action au niveau de l'individu,

Peut-on dire qu'une telle distinction sépare les bons citoyens des "chauffards" asociaux, ces derniers faisant consciemment courir des risques aux autres ? certainement pas, le concept de chauffard couvre une réalité, mais dans mon expérience les usagers prennent des libertés avec le code de la route parce qu'ils sont persuadés de pouvoir le faire sans prendre de risque pour eux ou pour les autres. Cette conviction est étroitement liée à la notion de risque ressenti (ou risque subjectif), bien différente du risque réel (ou risque objectif). La représentation que chacun d'entre nous se fait d'un risque dépend de son expérience et de l'interprétation qu'il en fait. Un conducteur qui fait souvent des excès de vitesse et n'a jamais eu d'accident grave utilise son expérience pour se convaincre qu'il peut conduire ainsi sans courir de risque. Ce faible niveau de risque ressenti dépend directement de la faible fréquence objective du risque d'accident si elle est rapportée à l'individu. 130 000 blessés par an dans des accidents de la route avec plus de 30 millions de conducteurs exposés au risque est une incidence faible qui ne peut pas donner à chacun d'entre nous une capacité d'exploitation de son expérience individuelle en fonction de son comportement routier pour en déduire un niveau de prise de risque. A l'opposé si le risque d'être contrôlé devient très supérieur au risque d'être accidenté, c'est cette expérience là qui va devenir prégnante et se révéler capable de modifier le comportement, même si l'usager n'est pas convaincu de la pertinence de cette adaptation "compte tenu des capacités qu'il se prête". Dans le va et vient permanent entre l'expérience et le comportement, la crédibilité du risque d'être pris et sanctionné devient le facteur majeur du respect des règles et donc de la prévention.

La principale éducation aux comportements routiers favorables ou défavorables à la sécurité est celle que les enfants reçoivent sur la banquette arrière de la voiture familiale. C'est une éducation pratique et elle s'exerce pendant plusieurs années et parfois plusieurs heures dans une journée lors d'un départ en vacances. Si l'intégration des nouveaux risques de sanctions par les parents modifient leur comportement, nous pouvons espérer que la génération qui va accéder à la conduite aura également un meilleur respect des règles. Cet effet pédagogique intervient également entre des usagers utilisant des véhicules différents et circulant sur les mêmes voies. Le contrôle social, (car il s'agit bien de cela, les codes de notre société comme le code de la route sont à la base du contrôle social) est un mécanisme circulaire avec des rétroactions permanentes. Quand le cercle tourne dans le sens favorable au respect des règles par l'individu, son effet est amplifié au niveau de la collectivité car les comportements individuels sont perçus par le groupe et contribuent à l'évolution de l'ensemble des individus. Le ralentissement des vitesses moyennes sur les routes au cours de la période récente, qui est maintenant un fait mesuré, est l'expression d'une nouvelle norme sociale intégrée par les usagers.