l'avertissement d'airy routier

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La première page de « l’avertissement » de l’auteur annonce qu’il ne sera pas question dans son livre de « défendre ou d’excuser le non respect des règles élémentaires de sécurité, ainsi que les comportements dangereux ou irresponsables. Des exemples ? La conduite en état d’imprégnation alcoolique réelle ou sous l’emprise de diverses drogues, le mépris des règles élémentaires de sécurité, la très grande vitesse lorsque la voie utilisée ou le trafic ne le permettent pas, etc. Bref : celui qui conduit à 100 km/h en ville et 190 km/h sur une route ou une autoroute chargée, avec quelques verres dans le nez,  est bel et bien un criminel en puissance et mérite de ce fait, d’être mis hors d’état de nuire ».

Les exemples de comportements dangereux ou irresponsables sont en contradiction avec la connaissance du risque lié notamment à la vitesse et à l’alcool qui croit de façon continue et exponentielle. Cela signifie qu'il n'y a pas de seuil au dessus duquel le risque existe et au dessous duquel il est inexistant. Le choix d'une limite de vitesse ou d'un seuil d'alcoolémie est un compromis social fondé sur une connaissance scientifique, mais ce n'est pas le scientifique qui l'impose, c'est le politique qui définit la limite qu'il considère comme acceptable, efficace et de bon sens. Face à une relation quantitative entre un facteur de risque et le risque produit, tout affaiblissement du facteur de risque va affaiblir les dommages.  Les exemples de comportements dangereux donnés par l'auteur correspondent à des risques très élevés et il est faux d'imaginer que les comportements se situant au dessous de ce niveau de prise de risque ne sont pas dangereux, ils sont simplement moins dangereux (F-1).

Cette partie du texte indique une position de fond de l’auteur à laquelle nous sommes habitués : seules des attitudes extrêmes caractérisent les criminels de la route en puissance qu’il faut mettre hors d’état de nuire. Cette défense est constamment utilisée par ceux qui se considèrent comme de très bons conducteurs pouvant se permettre de ne pas respecter le code de la route et qui stigmatisent des comportements plus fortement déviants que les leurs afin de justifier leur absence de respect des règles. Autrement dit : on peut conduire sous l’emprise d’un petit état alcoolique (le qualificatif de « réel » est une nouveauté dans mon expérience de ce type de littérature, je connaissais les imprégnations alcooliques à un niveau contraventionnel ou délictuel, faibles ou fortes, mais pas à un niveau « réel » laissant supposer qu’il y a des imprégnations alcooliques « irréelles »), on peut conduire à très grande vitesse lorsque la voie utilisée ou le trafic le permet. Les exemples qui viennent ensuite sont particulièrement provocants. On pourrait aller jusqu’à 100 km/h en ville, jusqu’à 190 sur une route ou une autoroute qui n’est pas « chargée ».

Pour comprendre comment ce fondement de la désinformation accidentologique recueille l’adhésion de nombreux conducteurs qui acceptent mal le respect des règles, il faut avoir à l’esprit les éléments de raisonnement suivants :

- la conduite est une pratique quotidienne pour la majorité d’entre nous. Cette familiarité et le fait que le plus souvent « tout se passe bien » produit une impression de sécurité et de savoir faire. Elle est utile car nous ne pouvons vivre dans une angoisse permanente quant aux risques liés à nos actes, ce serait à la fois pénible et potentiellement dangereux. A l’opposé cette assurance fondée sur l’expérience peut endormir notre vigilance, y compris dans des contextes manifestement problématiques. Si une alcoolémie de 0,80 g/l multiplie par quatre le risque d’accident, il est cependant possible de parcourir de très nombreux kilomètres avec cet accroissement du risque sans avoir d’accident. La conclusion de celui qui a acquis cette expérience peut être l’affirmation de sa capacité à conduire sans risque sous l’influence de l’alcool. Un autre conducteur mieux formé à la connaissance des risques comprendra qu’il a eu de la chance en s’exposant à ce risque sans provoquer d’accident, mais qu’il n’est pas meilleur que les autres.

- la notion de risque ressenti pour soi et la notion de capacité que l’on accorde aux autres sont fortement dissociées chez ceux qui n’ont pas de formation minimale aux probabilités. Le meilleur exemple est le résultat de sondages analysant cette différence. Ils ont utilisé des questionnements du type « estimez-vous être : un très bon conducteur, un conducteur assez bon, un conducteur assez moyen ou un conducteur très moyen ? », associés à une seconde question appliquant la même grille d’analyse aux autres (« Estimez-vous que les autres conducteurs sont … »). Il n’est pas surprenant que 12% des conducteurs estiment être « très bons » alors qu’ils appliquent ce qualificatif à seulement 1% des autres conducteurs. Symétriquement 3% se reconnaissent « très moyens » alors que 16% des autres sont reconnus comme tels (sondage IPSOS de mai 2000).

- la familiarité avec la pratique de la conduite permet de se construire une conviction personnelle de bonne aptitude à la conduite avec un risque ressenti faible. Cette situation transforme des millions d’usagers en « spécialistes de la sécurité routière » passant facilement du constat « je n’ai jamais eu d’accident grave » à la conclusion « j’ai compris les mécanismes de l’insécurité routière et je les maîtrise ». La connaissance scientifique de l’accidentologie est absente de cette évolution et une opposition radicale se constitue entre le spécialiste de comptoir de bar qui étale sur le zinc sa vérité et la connaissance scientifique de l’accidentalité.

Après ce début très éclairant dans lequel l’auteur décrit sa conception du comportement dangereux sur les routes, on se demande comment il va pouvoir exonérer de toute responsabilité les usagers se situant  entre le respect des règles et l’excès extrême qu’il dit ne pas vouloir défendre. Il reconnaît les progrès observés tout en affirmant que la forme extrême du délinquant de la route était « un homme des années soixante dix » qui a disparu. Les excès de vitesse de plus de 30 km/h « ne représentent plus que 0,73% des délits routiers ».  Ce personnage excessif serait systématiquement mis en avant par les « ayatollahs de la sécurité routière pour justifier l’incroyable arsenal répressif » alors qu’il n’existe plus ! Il constituerait « un épouvantail commode ».« Leur mise en avant médiatique participe d’une vaste entreprise de désinformation de l’administration, indispensable pour renforcer un peu plus chaque année l’arsenal répressif qui vise les citoyens normaux. Pour attraper quelques requins on lance des filets aux mailles millimétrées qui retiennent jusqu’aux plus petites des sardines ». On à l'impression en lisant ces phrases que la mort des pompiers de Loriol relèverait de comportements qui ont disparu !

Ces propos réunissent à la fois un déni de la nature des risques décrits par les experts de la sécurité routière et une affirmation erronée de l’absence de présentation par les pouvoirs publics du risque lié aux faibles excès de vitesse, ainsi qu’une interprétation de leur usage présentée comme une manipulation dont il n’apporte pas la preuve. Il y a donc deux erreurs (F-2 et M-1). En février 2007 la Délégation interministérielle a repris la diffusion par la télévision d’un très bon spot, déjà ancien, illustrant un automobiliste qui réussit à s’arrêter parce qu’il roule en ville à 50 km/h alors que celui qui roule à 60 va heurter le piéton. Cela n’exclut pas de lutter contre les accidents survenant à très grande vitesse et de militer pour la limitation de la vitesse des véhicules à la construction, La principale justification de la lutte contre la mise en circulation de véhicules qui peuvent rouler à 180, 200 ou 250 km/h n’est pas seulement la fraction non négligeable d’accidents provoqués par des vitesses de circulation très élevées, mais le danger lié à la mise en circulation de véhicules qui ne sont pas conçus pour respecter les règles et incitent à leur transgression. Ils sont plus souvent en excès de vitesse que les autres dans tous les contextes de circulation, aussi bien dans les zones à 70 qu’à 90 km/h.

Une des plus anciennes études européennes analysant le lien entre le risque de blessure et la vitesse de circulation (qui n’est pas la vitesse de collision, le freinage intervient entre la perception du risque et le choc) a été celle de Bohlin (ingénieur de Volvo). Il a établi en 1968 que le risque évolue comme une fonction rapidement croissante de la vitesse de circulation, bien représentée par une courbe exponentielle. Il confirmait ainsi les études faites aux USA par Solomon dix années auparavant. Cette constatation indique qu’il est absurde de nier le rôle des petits excès de vitesse. Bien entendu le risque est plus faible à 100 qu’à 120 sur une route à deux voies limitée à 90 km/h, mais s’il y a beaucoup plus d’usagers à 100 qu’à 130, le nombre de blessés ou de tués produit par les faibles excès de vitesse seront plus nombreux que ceux provoqués par les forts excès de vitesse. En 2005 l’Observatoire des vitesses a constaté que sur les routes départementales à grande circulation 23,7% des usagers étaient entre 90 et 100 et 1,3% à plus de 120. Obtenir le respect des vitesses maximales autorisées est un enjeu majeur de la sécurité routière.+

graphique bohlin

A ce stade de la construction de sa manipulation, l’auteur est confronté à une première difficulté logique. Il lui faut à la fois expliquer les gains en sécurité routière des dernières années, qu’il reconnaît (difficile de faire autrement !), tout en évitant d’imputer à la réduction des excès de vitesse moyens et faibles le rôle de facteur principal de ces gains puisqu’il a éliminé le rôle des très grands excès de vitesse ? Quelles pirouettes vont rendre ces affirmations compatibles ? Nous sommes seulement à la fin des deux premières pages et nous voyons que nous avons affaire à un manipulateur expérimenté, sachant manier la dialectique et le sophisme, le déni et le camouflage ainsi que la sélection de faits qui biaisent l’interprétation. Il veut affoler et convaincre tout en évitant de se faire prendre pour un casseur de société ordinaire qui se contente de nier la pertinence des  règles pour mieux s’autoriser à  les transgresser.

Commençons par l’examen des sept « personne ne nous dit » qui vont ponctuer cet « avertissement » de 5 pages. « Personne ne nous dit » est l’expression clé du sournois qui va mentir et souhaite créer une complicité avec le lecteur par le partage d’un secret qui lui a été caché jusqu’à maintenant. Il joue avec la pratique vieille comme l’information de l’évocation du  complot qui fait partie de la trousse à outils de base de tous les manipulateurs d’opinion et des auteurs de séries télévisées genre « X files ».

  1/« Personne ne nous dit cependant que cette baisse rapide du nombre de tués concerne en même temps toute l’Europe à l’exception de certains nouveaux entrants de l’Est en particulier la Pologne ». Qu’il s’agit avant tout « d’une évolution culturelle majeure. Partout, y compris en Italie et même en Turquie, qui a longtemps abrité les conducteurs les plus agressifs, la modification des comportements est évidente : la conduite est plus douce, dans un environnement moins stressant ». On impute à la réforme de la politique de sécurité routière observée depuis 2002 ce qui serait un phénomène général obtenu sans persécuter le bon père de famille. Cette affirmation est doublement fausse, d’abord on ne le cache pas (F-3) et ensuite cette évolution de type européen est totalement incapable d’expliquer l’ampleur des succès français et son moment de survenue (L-1).

Tous les communiqués triomphants de l’Union Européenne mettent en avant cette amélioration régulière des résultats pour masquer le fait que l’Union n’assume pas ses responsabilités par l’action sur les performances des véhicules (qui est une action relevant de ses prérogatives) et laisse les Etats traiter le problème avec le système de contrôle et de sanction (qui est efficace). Il est facile de démontrer la fausseté de cette assertion.

Exemples :

extrait du discours de Jacques Barrot au dernier conseil des ministres des Transports à Vérone le 3 novembre 2006 repris par les dépêches d’agences : « J'ai également le plaisir d'annoncer que le nombre d'accidents mortels dans l'UE a diminué de 8 % entre l'automne  2005 et l'automne 2006, soit le double des années précédentes ».

Le bilan annuel de l’insécurité routière, ouvrage produit par l’Observatoire National Interministériel de la Sécurité Routière et largement diffusé, présent sur le site internet du ministère de l’équipement, contient toutes les statistiques qui permettent de constater l’amélioration sur le long terme avec des irrégularités fortes sur le court terme témoignant non pas de variations aléatoires, mais de facteurs conjoncturels bien identifiés et de périodes d’activisme des Etats qui relancent périodiquement leur politique dans ce domaine, comme la France vient de le faire. Dans l’édition de 2005, 14 pages décrivent l’évolution de l’accidentalité en Europe de 1970 à 2004 (pages 191-204).

Vouloir utiliser cette tendance longue comme argument pour minimiser l’importance du retour à la crédibilité du système de contrôle et de sanction en France (c’est  le seul objectif de ce livre) est rendu possible par une double tromperie utilisant l’omission.

la première consiste à ne pas dire à cet endroit du livre où l’information serait pertinente (O-1) que dans le cas spécifique de la France, la période de cinq années allant d’avril 1997 à mai 2002 avait connu une réduction de la mortalité sur nos routes très faible de 2,25 %. (8008 tués de juin 1996 à mai 1997 et 7828 de juin  2001 à mai 2002). Nous n’étions donc pas dans une procédure généralisée à tous les pays et uniforme.

la seconde consiste à sembler considérer qu’il n’y a que la Pologne qui constate de mauvais résultats ou une faible réduction des risques. En se contentant de donner une indication qualitative (cette baisse rapide du nombre de tués concerne en même temps toute l’Europe) sans citer le moindre chiffre pour éviter de montrer que les différences quantitatives sont majeures, l’auteur trompe le lecteur (O-2).

L’auteur prend la période 2000/2005 comme référence. Si l’on calcule les réductions observées pendant la période 2000/2004 (2005 n’est pas encore disponible sur la base CARE de l’Union européenne) et si l’on regarde les graphiques de l’UE, il devient évident que les réductions de la mortalité routière pendant la période 2000/2004  dans les pays européens ne se sont pas faites au même moment et avec la même intensité dans tous les Etats.

FI Finlande                - 5,3%

UK Royaume Uni     - 5,92%

AT Autriche               - 10 ,04 %

IT Italie                      - 15,4%

ES Espagne                - 17.93 %

EL Grèce                    - 18.02 %

SW Suède                   - 18, 78%

IE Irlande                  - 19,38 %

NL Pays Bas              - 20,08 % (la valeur manquante dans le tableau pour 2004 est de 804)

BE Belgique               - 20.95 %

DK Danemark           - 25.9 %

PT Portugal                - 30,43 %

FR France                  - 31.79%

Les résultats favorables de la France sont encore plus significatifs si l’on prend comme base la période de mise en œuvre de la nouvelle politique de sécurité routière. Dans les 12 mois précédant mai 2002 la mortalité à 30 jours avait été de 8368 tués et elle a été de 4703 en 2006 soit une réduction de 43,8 %. La volonté de l’auteur de masquer le passage de la France d’une réduction de 2,25% à une réduction de 43.8% et d’attribuer cet effet à une évolution présente dans tous les pays de l’Union est une malhonnêteté. Il fallait à l’opposé reconnaître que dans la période récente de mise en œuvre d’une nouvelle politique de contrôle et de sanction  la mortalité routière en France a été réduite de plus de 40% et qu’aucun autre pays européen n’a connu un tel succès. Cette réduction est deux fois plus importante que la moyenne des pays de l’Union.

tableau mortalité europe

graphique mortalité

graphique mortalité

La présentation sincère de cette évolution comparée imposait de faire un graphique représentant d’une part l’ensemble des pays de l’Union à 14 hors la France (avec la Suisse et la Norvège) et d’autre part l’évolution de notre pays. Cette façon de faire permettait de visualiser la tendance favorable longue observée dans tous les pays de l’Union (amélioration des véhicules, amélioration des infrastructures, amélioration du comportement des conducteurs, notamment sous l’influence du système de contrôle et de sanctions) et de la distinguer des effets spécifiques du changement de politique de sécurité routière intervenu en 2002 dans notre pays. La France voyait la situation se dégrader par rapport à l’Europe de 1987 à 1988, elle a amélioré nettement ses résultats relatifs entre 1991 et 1993 puis a évolué comme le reste de l’Europe de l’Ouest jusqu’en 1997 avec une nette dégradation en 1998 qui lui a fait perdre le peu de progrès observés par rapport au reste de l’Europe de l’ouest. Une rupture s’est produite fin 2002 et vouloir affirmer que la France a évolué comme l'Europe est un déni de la réalité.

La seconde partie de l’explication des mécanismes de ce phénomène européen (la thèse de « l’évolution culturelle majeure ») repose sur une erreur méthodologique courante, la confusion entre la cause et la conséquence (L-2). Constater que la circulation s’est pacifiée en même temps que toute l’Europe observait une réduction de l’accidentalité ne permet pas une inférence causale. Là encore la brutalité de l’amélioration française s’accorde mal avec un brutal changement de comportement indépendant de l’application plus stricte de la réglementation. On ne provoque pas une évolution culturelle majeure d’un mois sur l’autre. Avant la redéfinition de la politique de sécurité routière le périphérique parisien tuait entre 12 et 20 personnes chaque année. Nous avons pu observer un effondrement de cette mortalité, avec même une année faste sans aucun mort sur le périphérique. Parallèlement la circulation est plus pacifique sur cette voie où la circulation est très dense, l’usager pressé qui faisait des appels de phare sur la file de gauche a pratiquement disparu. Il ne peut plus rouler à 100 voire plus sur cette file, notamment dans la soirée ou dans la nuit lorsque la circulation redevient fluide. La conclusion d’une « évolution culturelle »brutale est sans fondement, sauf à inclure dans le concept le fait que l’application stricte de la règle avec des moyens permettant de contrôler tout le monde provoque une modification des comportements que l’on qualifierait de culturelle. C’est étendre le concept de culture à la reconnaissance du caractère dissuasif d’un système de contrôle et de sanction efficace et cette reconnaissance doit être étendue au niveau européen car il n'y a pas que la France qui a amélioré son dispositif de contrôle et de sanction pour le rendre plus crédible et plus dissuasif.

2/  « Personne ne nous dit que, parmi tous ces pays, la France est le seul qui a mis au point un système de répression totalement automatisé, écartant délibérément toute responsabilité individuelle et toute analyse des situations particulières. Qu’il est le seul où a été écarté l’intervention des juges, garants de l’équité, au profit d’un système entièrement robotisé ».

La délinquance routière est une délinquance de masse. Chaque jour, des centaines de milliers d’infractions aux règles sont commises. L’idée que le recours au juge assure une meilleure équité que l’automatisation des sanctions est une affirmation contraire à la vérité. Airy Routier n’a pas dû lire les travaux de Claudine Perez-Diaz (« Jeux avec les règles pénales »), ni le rapport de la commission présidée par Michel Ternier sur les dysfonctionnements du système de contrôle et de sanctions. Avant 2002 plus de la moitié des infractions relevées n’aboutissaient pas (hors stationnement payant bien entendu), ce qui caractérisait une République bananière dans laquelle le trafic d’influence était camouflé sous le terme « d’indulgences ». L’absence d’équité du système était complète et l’automatisation du dispositif de contrôle et de sanction a permis de supprimer ce type de passe droit par la centralisation à Lille puis à Rennes du dispositif de traitement des excès de vitesse constatés par les radars automatiques. La protection des libertés est assurée par le permis à points, c’est la multiplication des infractions qui provoquera la suspension du permis et non une infraction isolée. Une délinquance de masse n’est pas accessible à une justice personnalisée. Revendiquer le retour à cette dernière consiste à revenir à l’inefficacité et l’absence d’équité du dispositif précédent. La variabilité des sanctions suivant les juges était une autre réalité constatée par les juridictions correctionnelles avant la modification du traitement contraventionnel des infractions routières les plus fréquentes. Nous verrons plus loin dans le livre que l’auteur reconnaît que le dispositif actuel est plus juste que la situation que nous connaissions avant les réformes de la fin 2002. Cela fait partie de sa pratique extensive de la contradiction, une notion pouvant être utilisée dans deux parties différentes du livre de façon totalement contradictoire.

Lors des travaux de la commission Ternier, les spécialistes des Pays-Bas et de la Grande Bretagne nous ont expliqué comment ils ont construit leur système de contrôle de la vitesse par des caméras surveillant le réseau routier. Certains dispositifs très intéressants vont au-delà des moyens mis en place en France, notamment la surveillance en continu des vitesses par des caméras qui lisent les plaques d’immatriculation et constatent les excès de vitesses en calculant une vitesse moyenne entre deux points. Il est en outre inexact d’affirmer que le dispositif interdit tout recours. Une institution de contrôle de nature judiciaire a été mise en place à Lille, puis à Rennes. Le dispositif permet de faire valoir une erreur matérielle de lecture d’une immatriculation, ou d’indiquer que le propriétaire n’était pas au volant (mais avec l’obligation légale d’indiquer à qui avait été confié le véhicule, ce qui est une procédure justifiée, un propriétaire prend une responsabilité en confiant son véhicule à un tiers, il doit l’assumer), ou de faire valoir le vol de son véhicule, ou de dénoncer l’emprunt de son immatriculation par un faussaire. Affirmer l’absence d’équité et l’absence de possibilité de recours est une double erreur (F-4 et F-5). Il faudrait associer à cette notion d'affirmation fausse la notion de contradiction car nous verrons qu'à d'autres endroits du livre l'auteur reconnaît que l'équité du système a été accrue.

3/ « Personne ne nous dit que les amendes routières ont rapporté 620 millions d’euros en 2006 ». C’est faux (F-6) ces chiffres sont largement publiés et commentés, notamment dans la presse automobile spécialisée. Affirmer que le dépôt d’une caution avant toute contestation vise désormais à « remplir les caisses de Bercy plutôt qu’à améliorer la sécurité routière » est un contre sens (il faut noter également qu’il est en contradiction avec l’affirmation précédente d’un système entièrement robotisé, si une contestation est possible, le système n’est pas robotisé). Si le dépôt d’une caution a été institué pour autoriser le recours c’est parce que la mesure était indispensable pour éviter que le système ne soit bloqué par une multiplication des recours abusifs. L’argent provenant des amendes routières du contrôle automatisé est affecté au développement et à l’entretien du dispositif et au financement d’actions de sécurité routière. Le mythe du racket d’Etat fait partie de ces raisonnements poujadistes primaires destinés à réveiller la vieille hostilité à l’impôt qui est un des outils de base de l’asocial ordinaire. L’intention a toujours été de développer des méthodes assurant une meilleure sécurité routière et l’affirmation d’une motivation financière est produite sans preuve (A-1).

4/ « Personne ne nous dit, parce que ce serait politiquement incorrect, que l’auteur comme la victime type d’infractions routières graves n’est pas ce cadre supérieur méprisant des autres que l’on montre du doigt comme un épouvantail social, mais se trouve parmi les populations issues de l’immigration et, plus généralement, dans les catégories sociales les plus pauvres ». Nous entrons là au cœur d’un problème très important en épidémiologie, celui des statistiques ethniques. Il est actuellement très débattu avec des arguments pertinents de part et d’autre. Le risque de leur développement est d’accentuer la séparation d’une société en sous groupes que l’on peut ensuite stigmatiser, comme le fait Airy Routier dans ce paragraphe, à l’opposé ces statistiques peuvent faire apparaître des discriminations mais également des mécanismes de différenciation qui permettent de comprendre les situations et éventuellement de réduire certains facteurs de risque.

Dans le cas particulier, l’auteur ne citant pas ses sources, et comme je ne connais pas d’analyses validées des différences d’accidentalité en fonction du critère « être issu de l’immigration » je conclus qu’il s’agit d’une affirmation sans preuve et je la classe comme telle (A-2). Dans un tel domaine, les facteurs de confusion sont très nombreux, un usager disposant de faibles moyens (et qui conduit) utilise habituellement un véhicule de peu de valeur, donc ancien. Est associé à la vétusté le faible poids (qui est un facteur de vulnérabilité) et l’absence d’un certain nombre de facteurs de protection (sacs gonflables, structure protectrice du véhicule avec avant déformable et habitable rigide, absence d’accessoires agressifs, voire réduction des risques par les nouveaux facteurs de sécurité primaire si valorisés par l’auteur). Ces différences peuvent faire que des usagers impliqués dans deux accidents comparables en ressortiront l’un indemne (et n’entrera pas dans les statistiques) l’autre blessé ou tué (et il entrera dans le dénombrement effectué par les pouvoirs publics). Actuellement, le bulletin d’analyse d’accident corporel de la circulation (BAAC), qui est à la base des statistiques publiques, contient un champ permettant de distinguer 10 rubriques socio-professionnelles. Il a été l’objet d’analyses descriptives limitées mais intéressantes. Le bilan 2005 de l’ONISR nous indique que 1,6% des conducteurs impliqués dans un accident conduisaient sans permis (3.2% dans les accidents mortels et la différence est importante, elle prouve que ceux qui conduisent sans permis sont plus exposés à être impliqués dans des accidents très graves, l’absence de permis est donc un indicateur de dangerosité accrue). Parmi ces usagers sans permis, les trois-quarts ne l’avaient jamais obtenu et un quart avait eu leur permis invalidé ou suspendu. C’est pour ce dernier groupe que le surrisque d’être impliqué dans un accident mortel est le plus élevé. Il existe un lien entre le défaut d’assurance et la catégorie socio-professionnelle d’une part et un lien entre le défaut de permis et le défaut d’assurances. A ma connaissance les données concernant la CSP n’ont pas été exploitées dans une étude multifactorielle comparant l’implication dans les accidents à la population générale exposée aux risques d’accident, avec le contrôle des facteurs de confusion. Dans l’état actuel du BAAC et compte tenu de la très mauvaise qualité du renseignement sur le type de véhicule (variable CNIT désignant le « code national d’identification du type ». Il me semble difficile de conduire une bonne étude avec cas témoins sur le risque relatif en fonction de la CSG et impossible de le faire sur le critère « issu de l’émigration » qui n’est pas prévu dans le BAAC. L’autre hypothèse que l’on peut formuler est que l’auteur se contente de montrer du doigt ceux qui sont « issus de l’émigration » pour se rapprocher des thèses de Jean-Marie Le Pen dont il indique par ailleurs qu’il se « démarque de tous les bien pensants » et dont il cite longuement la position favorable à l’amnistie des « actes n’ayant pas atteint l’intégrité des personnes ». Cette hypothèse peut également être confortée par la citation de l’humaniste Bruno Gollnisch, délégué général du Front National qui a déclaré : « Comme le dit Monsieur Le Pen, l’Etat français est une putain devenue chaisière. Il persécute les automobilistes en les écrasant de taxes et leur pourrit la vie avec ses amendes ». Il faudrait qu’Airy Routier nous indique ses sources pour porter un jugement autre que « affirmation sans preuve ».

5/ « personne ne nous dit que le nombre de morts sur autoroute a augmenté de 16,7% en 2005, alors même qu’y diminuait la vitesse moyenne, ce qui laisse à penser que le strict respect de la limitation de vitesse a eu pour contrepartie une baisse de la vigilance chez certains pendant que d’autres gardent en permanence un œil sur leur compteur au lieu de surveiller leur environnement ».

Isoler une variation quantitative dans une période limitée ne permettant pas une interprétation valide est une pratique fréquente des désinformateurs. Elle détruit l’argumentation. Il faut porter un jugement sur l’intégralité de la période pendant laquelle la nouvelle politique de sécurité routière a été appliquée et la comparer à la période précédente. Par rapport à 2002 la réduction de la mortalité a été de 38,5% sur l’ensemble des réseaux autoroutiers, de 36,2% sur les autoroutes de liaison et de 43,2% pour les autoroutes de dégagement. Exploiter la seule variation favorable aux thèses de l’auteur en négligeant les autres qui prouvent le contraire ainsi que l’évolution globale avant et après le changement des règles est ce que l’on appelle un mensonge par omission (O-3). C’est une façon de procéder contraire à toutes les bonnes pratiques statistiques. Il est par ailleurs abusif de vouloir interpréter sur une année le lien entre les données de vitesse moyennes mesurées sur les autoroutes de liaison par l’Observatoire des vitesses et un accroissement de 32 tués du nombre de victimes d’accidents mortels sur ce réseau. L’auteur se garde bien de dire que cette interprétation partielle des données ne peut se faire en l’absence de calcul d’un intervalle de confiance des mesures de vitesses et d’une analyse fine du lien entre la distribution des vitesses sur les autoroutes et la vitesse moyenne. Il ne dit pas non plus que la vitesse moyenne n’est pas le seul critère retenu par l’Observatoire des vitesses, il surveille également la proportion de dépassement de la vitesse maximale autorisée de plus de 10 km/h, cet indicateur s’est accru en 2005 par rapport à 2004.  Il y a là une seconde erreur par omission (O-4)

Tableau de l’évolution de la mortalité sur les autoroutes au cours des 6 dernières années (le changement du mode de dénombrement des tués sur les routes a été modifié en 2005, les décès sont maintenant pris en compte à trente jours. Le coefficient établi par l’ONISR pour passer des valeurs à 6 jours aux valeurs à 30 jours est de 1,069, ce qui explique que certains totaux diffèrent d’une unité par rapport à la somme des valeurs partielles).

année ARO dégagement ARO liaison toutes autoroutes
1999 184 313 497
2000 193 340 533
2001 190 303 493
2002 176 351 527
2003 150 294 444
2004 129 192 322
2005 100 224 324

graphique tués sur autoroutes

Une autre erreur intéressante à commenter est présente dans ces quelques lignes. L’auteur indique que cette légère détérioration de la mortalité sur les autoroutes de liaison dont nous venons de dire qu’elle ne pouvait être utilisée en la séparant du contexte statistique des dernières années, laisse à penser que les conducteurs ont été moins vigilants, ou ont trop fait attention à leur compteur aux dépens de leur sécurité. Il s’agit là d’une hypothèse non seulement sans preuves mais opposée à toutes les connaissances prouvées. Si cette hypothèse était vraie, la diminution des vitesses moyennes sur les autoroutes auraient du s’accompagner d’un accroissement de la mortalité, nous venons de voir que c’était l’inverse qui s’était produit. Dans tous les pays du monde, les réductions des vitesses de circulation sur les autoroutes se sont accompagnées d’une réduction de la mortalité. Chercher des valeurs isolées, sur des périodes courtes, avec des effectifs d’accidents faibles, pour tenter de  prouver une hypothèse qui est en contradiction avec ce que l'on observe sur la période longue est une erreur logique employée de façon habituelle par les désinformateurs, permise par l'erreur par omission signalée ci-dessus et je la confonds avec cette erreur déja signalée. J'ajoute cependant l'erreur logique de la tentative d'attribution de l'accroissement de la mortalité sur autoroute précitée à une diminution de la vigilance induite par la réduction de la vitesse(L-3).

La description honnête de ces faits était "nous avons observé une décroissance de la mortalité sur les autoroutes très forte depuis 2002, comparable à ce qui a été observé sur les autres réseaux routiers". Il n’y a là aucun argument sérieux pour soutenir ce « personne ne nous dit » !

6/ « Personne ne nous dit que l’amélioration de la sécurité routière est au moins autant due à là répression qu’à l’amélioration considérable de la sécurité active et passive des voitures de dernière génération ». L’auteur ne semble pas avoir relu son texte car j’ai l’impression qu’il a écrit l’inverse de ce qu’il voulait dire ! Non seulement il faut corriger ses erreurs factuelles et de logique, mais en plus il faut remettre ses phrases à l'endroit ! Il voulait sans doute écrire : « Personne ne nous dit que l’amélioration de la sécurité routière est au moins autant due à l’amélioration considérable de la sécurité active et passive des voitures de dernière génération qu'à la répression ».

La sécurité routière s’améliore depuis 1973 sous l’influence d’un ensemble de mesures qui agissent les unes sur les autres et il est très difficile de les dissocier en attribuant des pourcentages de réduction à chacun de ces facteurs. Cependant les délais avec lesquels ces facteurs interviennent ne sont pas identiques. J’ai déjà analysé cet argument très important et je n’y reviens pas ici. L’affirmation de l’auteur ne peut donc s’appliquer aux succès très importants obtenus en décembre 2002, d’un mois sur l’autre, qui ont été produits par la mise en œuvre d’une politique de contrôle et de sanction crédible qui a modifié le comportement des usagers. Dire que l’amélioration des véhicules a joué un rôle important dans le développement de la sécurité routière est exact, mais c’est une erreur par omission de ne pas nous dire que cet effet ne se manifeste que sur le long terme et ne concerne pas les progrès récents. En outre ce « personne ne nous dit » dépasse les limites du ridicule, les constructeurs, avec leurs moyens de communication sans commune mesure avec ceux de l’administration assurent la promotion de leurs progrès techniques en matière de sécurité depuis des décennies, notamment depuis que Volvo a su exploiter intelligemment la qualité de ses productions dans ce domaine (O-5 et L-4).

7/ « Personne ne nous dit que l’apprentissage de la conduite et l’examen du permis, compliqués à dessein, scolaires et hors de prix, sont totalement obsolètes, ce qui donne lieu à des trafics suspects d’auto-écoles peu scrupuleuses ». Ces quelques lignes sont passionnantes car elle réunissent toutes les perversions du fonctionnement mental de l’auteur ! On voit réapparaître la notion de complot avec ce « à dessein » qui tente de caractériser une malfaisance. L’administration et ses associés ne sont pas simplement mauvais, incapables de mettre sur pied quelque chose d’efficace et bon marché, c’est « à dessein » qu’ils ont concocté une usine à gaz compliquée, scolaire, hors de prix et obsolète ! (C-1). Comme dans toute organisation il y a des tricheurs et quelques exemples de trafic d’influence et d’achats d’inspecteurs du permis de conduire sont documentés. Ils sont exceptionnels et il est ridicule de mettre en avant ces « trafics suspects d’auto-écoles peu scrupuleuses » pour détruire la valeur du permis de conduire.

Affirmer que cet apprentissage est obsolète est une notion indépendante du mécanisme du complot. C’est une affirmation sur la qualité de l’enseignement délivré qui ne repose sur aucune preuve, nous reviendrons sur ces faits.

La conclusion de cet avertissement est à la hauteur des pages précédentes. L’Etat infantilise et culpabilise avec le soutien des associations qu’elle finance comme des « supplétifs ». Je ne fais pas partie des associations de lutte contre l’insécurité routière, notamment de la Ligue contre la violence routière, mais je travaille régulièrement avec elles, je connais suffisamment celles et ceux qui ont dirigé ou dirigent actuellement la Ligue pour savoir que ces propos malveillants sont à la hauteur des valeurs de l’auteur et non à la hauteur de celles et de ceux qui luttent contre la déshumanisation d’une société. Ce sont les associations qui se sont battues pour obtenir des décideurs politiques qu’ils passent à l’acte. Là encore l’auteur inverse les rôles. Quand les routiers (sans jeu de mots !) ont barré les routes pour s’opposer au permis à points, ce sont Ghislaine Leverrier et Geneviève Jurgensen qui ont fait le siège des décideurs pour maintenir la mise en œuvre du dispositif tel qu’il avait été conçu. Quand des décideurs politiques irresponsables ont envisagé de réduire, voire de supprimer le délai de 6 mois pendant lequel on ne pouvait pas repasser un permis annulé, Chantal Perrichon et Geneviève Jurgensen se sont mobilisées pour s’opposer à cette mesure qui détruisait la capacité de dissuasion du permis à points.

 Quant au racolage des sept millions de citoyens qui ont perdu un ou plusieurs points par Airy Routier qui veut les associer à sa cause, c’est une manipulation supplémentaire. Il est un délinquant « volontaire » qui a perdu son permis et continue de conduire au mépris des lois, cette situation n’est pas comparable à celle des usagers qui ont commis une erreur involontaire et ont perdu un ou plusieurs points. Cet amalgame manipulateur est au cœur de l’objectif du livre : faire peur aux Français. Nous pouvons tous faire une erreur de conduite, ne pas voir un panneau de limitation de vitesse, se contenter de lever le pied et non de freiner pour se mettre à la vitesse prescrite, ou même passer un feu au rouge par inattention lorsque l’on cherche sa direction sur une voie qui ne vous est pas familière. Le permis à points est fait pour que ces fautes ne pénalisent pas anormalement celui qui les a commises. Cet instrument de l’équité sur les routes ne finit par sanctionner gravement que celui qui méconnaît l’avertissement et poursuit ses comportements déviants au lieu d’être attentif aux autres et aux règles. Quand cette attitude conduit à l’annulation du permis et à la conduite sans permis, nous ne sommes plus dans le même camp. La faute non intentionnelle est une faute, mais elle ne relève pas du délit intentionnel commis par celui qui va volontairement au-delà des vitesses autorisées, ne respecte pas un stop qu’il a parfaitement vu, téléphone au volant et accepte les alcoolisations qui ne sont pas des « imprégnations alcooliques réelles ». Le développement des radars automatiques a accru très fortement le nombre de conducteurs ayant perdu un ou plusieurs points et il va continuer à l’accroître. C’est le prix à payer pour atteindre le niveau de sécurité qui est maintenant le nôtre. Il ne va pas modifier la liberté de conduire de la quasi-totalité des conducteurs, mais simplement les rendre plus attentifs et c’est le but recherché. Actuellement les annulations de permis faute de points qui étaient de 0,03% avant 2003 sont passé à 0,11% en 2005, soit environ 1 pour mille. Ces chiffres là ne sont pas indiqués par l’auteur, il aime mieux retenir les 7 millions de conducteurs qui ont perdu au moins un point que les dizaines de milliers qui sont allés jusqu’à la perte de leurs douze points !

Un dernier élément est à prendre en considération, pourquoi Airy Routier, qui me cite une douzaine de fois dans ce livre, n’a-t-il pas cherché à me rencontrer en écrivant ce livre ? Je ne suis pas un chercheur travaillant exclusivement avec les constructeurs (je l’ai fait pendant trente ans) ou avec les pouvoirs publics (je le fais toujours),  je suis à la disposition de tous ceux qui me demandent des explications et des informations. Les journalistes savent depuis des décennies qu’ils peuvent m’appeler sans risque d’être éconduits, la prévention passe en grande partie par la communication et j’ai toujours accepté de leur parler et de m’exprimer publiquement. Il est significatif qu’Airy Routier ait évité cette démarche. Il ne voulait surtout pas que je puisse démonter ses erreurs et ses manipulations avant de les avoir diffusées. J’aurais pu prouver ensuite que non seulement il écrivait n’importe quoi pour soutenir ses thèses, mais qu’il l’avait fait en pleine connaissance de cause ! Thierry Meyssan n’a pas cherché à rencontrer ceux qui travaillaient sur les attentats du 11 septembre, il a collecté toutes les élucubrations traînant sur l’internet pour produire un livre de fiction. La procédure suivie par l’auteur de « La France sans permis » est identique, il construit une représentation artificielle à partir d’une situation réelle avec un intérêt personnel. Le livre devait avoir pour titre « Airy Routier est sans permis et il voudrait nous faire croire que ce n’est pas de sa faute et que tous les Français finiront par devenir des asociaux de sa trempe, par hasard ».