le plan gouvernemental de janvier 2015

Le ministre de l'intérieur, Bernard Cazeneuve, a présenté le 26 janvier un ensemble de 26 mesures, en réaction au bilan désastreux de l'année 2014. Pour la première fois depuis 12 ans, le nombre de tués sur les routes a dépassé celui de 2013. 120 victimes de plus. Aux yeux du ministre : "Le plan d’action pour la sécurité routière vise à mobiliser l’ensemble des registres d’intervention en matière de sécurité routière. De la formation des conducteurs à la sécurité des véhicules et des infrastructures, il constitue un plan global et cohérent."

Il convient d'analyser ce plan en détail avant de porter un jugement sur son adaptation à la situation et sa capacité de provoquer un retour à la décroissance de la mortalité permettant de rejoindre la courbe du projet gouvernemental.

Il faut remarquer que le plan gouvernemental n'est pas argumenté ni évalué. Il est donc difficile d'en faire une analyse quantifiée. La seule ressource est d'évaluer unilatéralement les gains envisageables, faute de pouvoir donner un avis sur des réductions quantifiée avancées par les auteurs de ce plan. Cette page sera développée au cours des jours à venir.

1/  Modernisation accrue de l’enseignement de la conduite, en lien avec les formateurs agréés. La réforme du permis de conduire ouvre la conduite accompagnée dès 15 ans avec possibilité de passer l’examen de conduite à 17 ans et demi : des jeunes conducteurs mieux formés, c’est une accidentalité réduite.

Commentaires : il y a deux propositions différentes dans cette mesure. La réforme du permis de conduire va améliorer la formation et donc réduire l'accidentalité. L'examen de conduite pourra être passé à 17 ans et demi. Ce genre d'affirmation ne peut être évaluée sérieusement. Nous verrons quelle sera l'effectivité de la réforme du permis, elle dépendra beaucoup des moyens accordés à la formation des formateurs. Quand à l'abaissement à 17 ans et demi de l'examen de conduite, il ne peut qu'accroître le niveau de risque des jeunes conducteurs. L'aptitude à prendre en compte un risque et d'adapter son comportement va croissant avec l'âge dans tous les domaines.

2/ Généralisation d’un module de sensibilisation à la sécurité routière en classe de seconde dès la rentrée 2015, ainsi que lors des journées de défense et de citoyenneté suivies par les jeunes à partir de leur 18ème année. Alors que la formation à la sécurité routière s’interrompt aujourd’hui en classe de 3ème, il s’agira de mieux préparer les jeunes à
devenir des usagers responsables jusqu’à l’âge du permis de conduire.

Commentaires : Il est de bon sens de vouloir combler tous les vides dans la chronologie de la formation à la compréhension du risque routier. Dans ma hiérarchie de l'efficacité de la formation à la conduite, le modèle parental est le plus important. Les enfants et les adolescents construisent leur relation avec la conduite sur la banquette arrière du véhicule de leur parent. C'est pour cette raison que la mortalité des jeunes conducteurs demeure proportionnelle à celle des adultes. Faire respecter les règles par les adultes demeure la méthode la plus efficace pour avoir le même comportement chez les jeunes adultes qui deviennent des conducteurs. L'efficacité de la mesure annoncée n'est pas évaluable.

3/ Développement des opérations de sensibilisation aux risques liés aux pratiques addictives et à l’utilisation du téléphone portable au volant. Sensibilisation de l’opinion à la question des blessés de la route – une campagne nationale d’information sera lancée dès le mois de février.

Commentaires : cette proposition relève de la même problématique que les précédentes. Elle repose sur l'hypothèse de l'obtention possible d'un résultat par la présentation rationelle de ce que doit être un comportement raisonnable. "Opération de sensibilisation" est l'expression rituelle qui désigne actuellement ce type de démarche. Le problème est insoluble quand l'attitude des pouvoirs publics sur l'un des exemples donnés est contradictoire. Il est impossible de convaincre un usager qu'il serait dangereux d'utiliser un téléphone avec des oreillettes ou un portable tenu à la main et non dangereux de téléphoner avec un dispositif bluetooth, alors que le facteur de risque est l'usage de l'attention pour une tâche autre que la conduite, en relation avec un correspondant qui ne sait pas quel est votre contexte de conduite (différence avec le risque lié à la présence d'un usager ou à une situation passive telle que l'écoute de la radio).

4/Création d’un site internet du Conseil national de la sécurité routière (CNSR). Il permettra de mieux sensibiliser le public aux enjeux de la sécurité routière.

Commentaires : identiques à ceux concernant les propositions précédentes, c'est bien, c'est du bon sens, c'est facile, cela ne contrarie personne ! Je m'aperçois que j'ai créé ce site il y seize ans. Il y a quelques jours une personne m'a abordée dans un magasin et m'a dit qu'elle regardait régulièrement mon site et qu'elle apprenait beaucoup sur ce sujet qui est important à ses yeux. Celà m'a fait plaisir, mais je sais que le problème n'est pas de motiver les gens qui s'intéressent à la sécurité routière, mais d'attirer ceux qui n'ont pas ce type de préoccupation. Le site du CNSR aurait un intérêt s'il devenait un site de combat. Il pourrait par exemple expliquer comment le ministre de l'intérieur a annoncé en juin dernier lors d'une séance du CNSR qu'il n'appliquerait pas la proposition d'abaissement à 80 km/h de la vitesse maximale sur le réseau bidirectionnel. Cette annonce a été faite AVANT que la commission du CNSR présente son rapport sur la proposition et que le CNSR vote pour donner son avis au ministre. Quand on exprime ainsi son mépris pour le travail des autres, il ne faut pas espérer se faire respecter. Il sera intéressant de voir comment ce type de conflit est présenté sur le site du CNSR. Je n'ai pas de grands espoirs sur leur aptitude au combat.

5/ Mise en place sur le site de la Sécurité routière (DSCR) d’une rubrique « à l’épreuve des faits », délivrant à nos concitoyens une information de qualité et réactive face aux idées reçues et fausses affirmations sur la sécurité routière (technique du fact-checking).

Commentaires : Enfin une mesure intéressante et indispensable. Son fonctionnement va exprimer la sincérité des décideurs qui ont accepté de développer cette procédure. Elle n'est pas nouvelle, mais elle peut être dévastatrice pour les menteurs manipulateurs si elle est conduite avec courage, c'est à dire sans inhibition et sans crainte de désigner personnellement ceux qui propagent des affirmations fausses dans le domaine de la sécurité routière. Un exemple de bon usage de cette procédure est donné par les rubriques "Intox Désintox" qui se multiplient, notamment celle du journal Libération. Un propos, une identification précise de celui qui a tenu ces propos, dans un journal, dans un média parlé ou à la télévision. Une analyse argumentée et une conclusion qui tente de distinguer l'incompétence de la malfaisance (j'ai écrit un livre sur ce thème : "Comment tuer l'Etat, précis de malfaçons et de malfaisance" aux éditions Bayard. J'en ai écrit un autre intitulé "La violence routière, des mensonges qui tuent" publié par un éditeur de livres scientifiques (éditions Lavoisier). Un seul des menteurs cités a porté plainte pour diffamation. Quatre heures de débats devant la 17ème chambre correctionnelle et un jugement d'une qualité parfaite qui me donne confiance dans la justice : " le prévenu (moi) pouvait affirmer comme il l'a fait que les erreurs factuelles et de raisonnement qu'il dénonçait relevaient d'une volonté délibérée de l'auteur de travestir la vérité et de tromper le lecteur". Nous verrons si la démarche entreprise est courageuse, donc personnalisée, ou anonyme, donc sans pouvoir dissuasif.

6/Abaissement du taux légal d’alcoolémie de 0,5 g/l à 0,2 g/l pour les conducteurs novices (3 ans après le permis, ramenés à 2 ans après le permis s’il a été précédé d’un apprentissage par conduite accompagnée). Les accidents de la route sont la première cause de mortalité des 18-25 ans.

Commentaires : Cette proposition est intéressante car elle est la preuve du déficit méthodologique dans la préparation des annonces faites le 27 janvier. Cette mesure avait été débattue au sein du comité des experts et les arguments développés avaient fondé un avis défavorable.Ils sont toujours valables. Le fondement d'un raisonnement lors de l'élaboration d'une mesure de sécurité routière repose sur la comparaison entre les enjeux, la faisabilité, l'efficacité envisageable et les coûts. A elle seule cette mesure imposait un argumentaire très complet permettant de justifier un tel choix. Je vais l'amorcer en me limitant au point le plus important : l'enjeu de la mesure. Je développerai d'autres arguments dans les semaines à venir.

Si le ministère ou l'Observatoire national interministériel de sécurité routière ont une évaluation différente, ils peuvent publier leur méthode de calcul et ses résultats.

7/ Renforcement des contrôles des exploitants de débits de boissons autorisés à fermer entre 2h00 et 7h00 qui ont obligation de mise à disposition de dispositifs d’autocontrôle. Sanctionner administrativement en cas de non-respect, jusqu’au retrait des autorisations d’ouverture tardive, voire de vente de boissons alcoolisées.

Il est inutile de produire un long commentaire pour une telle mesure. Le ministre nous dit simplement qu'il faut faire respecter des textes existants. Dans toutes les situations analogues la question qui s'impose porte sur l'évaluation de la mesure, donc sur les indicateurs mis en place et leurs résultats. Dans le cas particulier :

Nous verrons alors dans le bilan 2015 quelle est la qualité de la gestion de la mesure annoncée.

8/ Formation de tous les médecins agréés au dépistage précoce des problèmes d’alcool et de stupéfiants. Les médecins agréés pour l’évaluation de l’aptitude médicale à la conduite réalisent 1 million de consultations par an. Environ 400 000 consultations sont réalisées en commissions médicales en préfecture pour toutes les infractions liées à l’alcool et aux stupéfiants. Les 600 000 autres sont réalisées en cabinet de ville pour les conducteurs professionnels, les usagers porteurs de problèmes médicaux et les infractionnistes, hors alcool et stupéfiants.

Commentaires : Cette mesure exprime une méconnaissance profonde des problèmes posés aux médecins agrées par la consommation d'alcool et de stupéfiants. Ils n'ont pas besoin d'une formation supplémentaire, mais de moyens et d'organisation. Dans le cadre du groupe d'experts auprès du CNSR, nous avions reçu des médecins agréés qui nous avaient décrit leurs mauvaises conditions de travail (notamment dans le domaine de leur secrétariat), l'insuffisance de coordination entre les départements et l'insuffisance de connaissance du passé des usagers dont ils devaient évaluer les compétences. Nous savons que le problème majeur posé par les usagers dépendants d'une consommation d'alcool ou de stupéfiants est celui de la récidive et de la conduite sans permis.

9/ Interdire le stationnement des véhicules (à l’exception des deux-roues) 5 mètres avant les passages piétons pour améliorer la visibilité entre piétons et conducteurs.

Commentaires : Cette mesure est pertinente. Elle est réclamée par tous les promoteurs de la sécurité des piétons en agglomération. Comme pour la majorité des mesures définies dans cette liste, le problème est l'absence de définition pratique de la mise en oeuvre d'une telle mesure. Il faut rappeler des notions élémentaires sur les responsabilités des acteurs de la sécurité routière. Le niveau national ne gère plus qu'une faible partie des voies (en dehors des autoroutes, 5835 km de réseau national sur un million de kilomètres de voies ouvertes à la circulation), son rôle est principalement de fixer les règles et les lois qui vont s'imposer aux gestionnaires de terrain, principalement les communes et les départements.

Si le ministre se limite à une recommandation d'aménagement des abords des passages pour piétons interdisant le stationnement cinq mètres avant ces passages, la mesure n'aura aucune efficacité, car ce sont les communes qui devront faire preuve de volontarisme pour l'appliquer.

Si le ministre souhaite que la mesure soit réellement appliquée, il doit l'intégrer dans un texte règlementaire définissant l'obligation et fixant une date limite pour la mise en application. En agissant ainsi, il exprimera la différence entre l'effectivité d'une mesure et un effet d'annonce destiné à allonger une liste. Une telle procédure peut être définie dans un décret spécifique sur le modèle du Décret n°94-447 du 27 mai 1994 relatif aux caractéristiques et aux conditions de réalisation des ralentisseurs de type dos d'âne ou de type trapézoïdal. Elle peut également s'intégrer au volumineux arrêté du 24 novembre 1967 relatif à la signalisation qui décrit les obligations en matière de signalisation, incluant la signalisation au sol.

Le problème sera le financement des avancées de trottoir au niveau des cinq mètres de stationnement interdit, cet aménagement est le seul efficace pour éviter le stationnement.

10/ Permettre aux maires d’abaisser la vitesse sur de grandes parties, voire sur la totalité de l’agglomération (et non plus uniquement dans quelques rues), pour réduire le nombre et la gravité des collisions.

Commentaires : Il conviendrait de préciser la portée de cette annonce à laquelle je ne comprends rien. Il y a actuellement de nombreuses communes qui ont une limitation de vitesse à 45 km/h (habituellement le maintien de ce niveau de vitesse qui avait été fixé avant la réduction généralisée à 50 km/h de la vitesse maximale en ville en 1990 par des maires qui estimaient la limite à 60 km/h trop élevée). Le code de la route permet de définir des "zone trente" (alinéa 16 de l'article R-110-2 du code de la route) et les "villes trente" se multiplient. Des "zones de rencontre limitées à 20 km/h sont également définies dans le décret du 30 juillet 2008.  L'intention est-elle de rendre possible des limitations à 20, 30 ou 40 km/h sans avoir les autres dispositions caractérisant les zones zones de rencontre et les zones trente ?

11/ En lien avec la Chancellerie, renforcer les sanctions pour les conducteurs qui, stationnant sur les passages piétons, sur les trottoirs ou sur les pistes cyclables, mettent en danger les piétons en les obligeant à les contourner.

Commentaires : La rédaction de cette mesure exprime toute la différence entre une mesure floue décidée unilatéralement et une décision précise adoptée au niveau interministériel. Le ministre veut-il modifier l'article R 417-10 du code de la route qui sanctionne déjà sévèrement le stationnement dangereux qui est défini avec précision  ?

I. - Tout véhicule à l'arrêt ou en stationnement doit être placé de manière à gêner le moins possible la circulation.
II. - Est considéré comme gênant la circulation publique l'arrêt ou le stationnement d'un véhicule :
    1° Sur les trottoirs, les passages ou accotements réservés à la circulation des piétons ;
    1° bis Sur les voies vertes, les bandes et pistes cyclables ainsi qu'en bordure des bandes cyclables ;

12/ Relancer le déploiement de radars feux rouges et leur associer systématiquement un module de contrôle de la vitesse, notamment en agglomération.

Commentaires : Combien de radars feux rouges en plus dotés d'un contrôle de vitesse ? dans quels délais ? avec quel montant de financement ? En l'absence de ces précisions, la mesure n'a aucune valeur.

13/ Uniformiser la taille et le format des plaques d’immatriculation des deux roues motorisés, afin de faciliter les contrôles.

Commentaires : Le projet est ancien. Quelles caractéristiques pour ces plaques et quelle date de mise en oeuvre obligatoire. Toujours la même ambiguïté entre l'annonce et l'effectivité.

14/ Rendre obligatoire pour les usagers de deux-roues motorisés le port du gilet de sécurité en cas d’arrêt d’urgence, comme c’est déjà le cas pour les automobilistes.

Commentaires : De l'obligation du port adopté puis annulé par l'arrêté du 18 décembre 2012, nous voila revenu à l'obligation moins contraignante de la seule possession et du port en cas d'arrêt d'urgence. Là encore, quelle date pour l'effectivité de la mesure ?

15/ Généraliser à terme l’utilisation de supports de panneaux de signalisation « fusibles », qui ne nécessitent pas de glissière de sécurité, et diminuent les risques pour les deux-roues motorisés.

Commentaires : Un exemple supplémentaire de velléité d'action difficile à rendre effective. Le coût de la mise en oeuvre va porter sur les communes et les départements. La réalisation impose un recensement précis des panneaux concernés, après production d'un texte réglementaire définissant les caractéristiques de ces supports fusibles. Combien de temps pour produire cette norme ? combien de temps pour faire l'expertise des panneaux à modifier ? A mes yeux le type même de l'annonce bidon.

16/ Poursuivre la modernisation du parc des 4 200 radars afin de mieux lutter encore contre la vitesse excessive ou inadaptée sur les routes (radars chantiers pour la sécurité des personnels, radars mobile de nouvelle génération).

Commentaires : Doublon avec la mesure 12. Il faut bien entendu développer et adapter en permanence ces techniques automatisées de contrôle. Nous connaissons bien leurs limites qui impliquent toutes des défaillances de l'Etat. L'interdiction du signalement des radars déplaçables n'est toujours pas assurée. Les radars mobiles de nouvelle génération ont été sous utilisés, faute de personnels pour les mettre en oeuvre. Il faut accepter le développement d'une sous-traitance de leur usage pour leur donner leur pleine efficacité.

17/Lutter contre les contournements de la loi en matière de contrôle automatisé, notamment : en déployant des radars double-face qui permettront aux enquêteurs de mieux identifier les auteurs des infractions ; en rappelant sur les avis de contraventions que les personnes morales ne peuvent se substituer aux personnes physiques pour
l’acquittement des amendes qui, comme les éventuels retraits de points de permis, s’appliquent au conducteur en infraction.

Commentaires : L'identification des usagers en infraction devait être mieux organisée dès la mise en service des radars automatiques. Toutes les entreprises sérieuses dont les véhicules sont utilisés par plusieurs personnes ont mis en place une identification des conducteurs. Il fallait la rendre obligatoire sous la forme d'un carnet de bord permettant à tout chef d'entreprise d'identifier l'employé ayant commis l'infraction, l'absence de cette capacité étant sanctionnée très sévèrement.

18/ Exiger, lors de la demande de certification d’immatriculation d’un véhicule, la désignation d’une personne titulaire du permis de conduire correspondant au type de véhicule à immatriculer. Cette personne sera
responsable en cas d’infraction constatée, à défaut d’identification du conducteur en infraction.

Commentaires : Cette mesure est complémentaire de la précédente. Les chefs d'entreprise et les particuliers doivent être responsables des véhicules qu'ils possèdent. Le fait d'exiger un permis de conduire à le mérite d'éviter de déclarer un enfant comme propriétaire du véhicule ou d'acheter un véhicule alors que l'on ne possède pas un permis permettant de le conduire.

19/ Agir contre le défaut d’assurance en se donnant les moyens techniques de vérifier l’adéquation entre les véhicules assurés et les véhicules immatriculés.

Commentaires : A nouveau une mesure qui me semble totalement incompréhensible. Elle imposait quelques lignes d'explication de la méthode qui permettra de lutter contre une fraude mal définie dans son mécanisme et son intérêt.

20/ Observer, sur certains tronçons de route à double sens identifiés comme particulièrement accidentogènes, l’impact d’une diminution de la vitesse maximale autorisée de 90 à 80 km/h.

Commentaires : Nous savons bien que cette mesure n'est pas une alternative à l'abaissement à 80 km/h de la vitesse maximale autorisée sur le réseau bidirectionnel. C'est une annonce maladroite pour donner l'impression que l'on va faire quelque chose dans ce domaine, tout en donnant satisfaction au lobby de la vitesse en limitant la mesure à "certains tronçons de route identifiés comme particulièrement accidentogènes". Vouloir observer l'impact d'une diminution de la vitesse maximale autorisée sur l'accidentalité d'une route est aussi pertinent que l'annonce d'une étude pour observer l'impact d'une réduction de la vitesse maximale de 90 à 80 km/h sur la consommation de carburant. En renonçant à la généralisation de la vitesse maximale autorisée sur le réseau bidirectionnel, le ministre a renoncé à la mesure la plus efficace pour atteindre l'objectif de 2000 tués en 2020. Sa responsabilité sera très importante dans l'échec du projet gouvernemental.

21/ Expérimenter dans 11 départements, en lien avec la Mildeca, la technique du double prélèvement salivaire en matière de dépistage des stupéfiants, en vue de la généraliser et d’augmenter ainsi le nombre de contrôles.

Commentaires : Le rédacteur commençait à fatiguer au moment de rédiger cette 21ème proposition. Elle est incompréhensible pour le commun des mortels. Un double prélèvement ne peut que doubler le temps nécessaire pour un contrôle et donc réduire le nombre de contrôles !

22/ Interdire de porter tout système de type écouteurs, oreillette, casque, ...susceptible de limiter tant l’attention que l’audition des conducteurs.

Commentaires : Cette mesure est très importante, mais, comme je l'ai déja dit à propos de la mesure 3 il fallait bien entendu l'étendre à l'ensemble des communications téléphoniques lors de la conduite. Le "susceptible de limiter l'attention" est la motivation principale de cette interdiction. L'argument souvent utilisé de l'impossibilité de vérifier l'usage d'un bluetooth n'est pas pertinent. Conduire sous l'influence d'une alcoolémie modérée ne se voit pas et pourtant la loi l'interdit et un dépistage de l'alcoolisation est effectué dans tous les accidents corporels. Il faut interdire toutes les formes de communication interactives, écrites ou parlées, avec de rares exceptions concernant des échanges très structurés, toujours de même nature, par exemple ceux intervenant entre un chauffeur de taxi et le standard téléphonique recevant les appels. Organiser la recherche d'un appel dans tous les accidents corporels graves et les accidents mortels doit faire partie de l'enquête qui accompagne un accident corporel.

23/Préciser la réglementation du surteintage des vitres à l’avant des véhicules pour garantir le bon contrôle de certains comportements dangereux (utilisation du téléphone au volant, non port de la ceinture de sécurité ...)

Commentaires : Bonne mesure, mais là encore sans commentaire précis (faisabilité dans le cadre de l'Union Européenne, qui va établir une norme, quand sera-t-elle effective).

24/ Réduire les risques de contresens sur autoroute en alertant les conducteurs désorientés par l’installation de panneaux « sens interdit » sur fond rétro-réfléchissant sur les bretelles de sortie.

Commentaires : L'enjeu est réduit mais réel et de multiples dispositifs ont été imaginés pour limiter ce risque. Les usagers qui prennent à contre sens une bretelle de sortie (souvent à partir d'un giratoire situé au dessus de l'autoroutes) sont souvent fortement alcoolisés ou avec une capacité de conduite dégradée se manifestant en particulier sur des intersections complexes qui ne leurs sont pas familières. Il faut attirer leur attention par des méthodes utilisant des panneaux avec un éclairage scintillant, plus efficace qu'un simple fond rétroréfléchissant qui est déja largement utilisé. Un bon emplacement de ces panneaux est également très important pour prévenir le risque de prise d'une bretelle à contre sens.

25/ Soutenir les démarches européennes sur l’installation d’enregistreurs de données de la route (EDR) dans les véhicules pour mieux connaître les mécanismes d’accident.

Commentaires : Le genre de démarche reconnue comme sans espoir à court terme par tous ceux qui connaissent la puissance du lobby allemand de la vitesse au niveau des structures de l'Union Européenne. Le projet d'EDR (event data recorder ou projet Véronica) permet aux prestataires de service de la commission de produire des rapports énormes et coûteux qui soulèvent volontairement toutes les difficultés imaginables pour ne pas passer à l'acte. Pour rire (donc pour ne pas pleurer) je cite une phrase ancienne de cette organisation de défense de la vitesse excessive : "The need to develop and implement an Event Data Recorder (EDR) originates from the European Commission DG TREN White Paper on Transport issued in 2001." L'hypocrisie de cette structure est sans limites. Elle est capable de dire ce qu'il faudrait faire, de prétendre qu'elle avait envisagé la mesure dès 2001 et ensuite de tout faire pour ne pas le faire. Heureusement les constructeurs, notamment américains, sont conscients de l'utilité des enregistreurs d'événements pour se protéger des recours abusifs d'usagers impliqués dans des acccidents. Le développement de ces boites noires est inéluctable et le soutien français ne changera pas grand chose au calendrier.

26/ Fournir aux collectivités locales des outils pour les soutenir dans leurs démarches d’amélioration de la sécurité routière : guides techniques pour les encourager à réaliser, comme le fait aujourd’hui l’Etat sur son réseau, des audits de sécurité ; partage de bonnes pratiques.

Commentaires : Le soutien technique au collectivités locales est un enjeu important et identifié depuis des décennies. Une tentative avait été faite par Christian Gérondeau, avec le soutien de la caisse des dépôts. Elle avait malheureusement échoué, principalement à la suite du décès de la personne particulièrement compétente qui avait pris en charge cette fonction de conseil, distincte du rôle des entreprises qui ont inévitablement des conflits d'intérêts quand elles donnent des conseils. Des conseils de bonnes pratiques écrits sont disponibles dans les documents du CEREMA, notamment dans sa branche "ex CERTU", mais le handicap dans la diffusion de ces documents est leur coût. Certains sont gratuits, mais les plus importants font hésiter les petites communes et surtout les associations qui ont un besoin évident de ces documentations pour développer leurs connaissances et produire des demandes documentées. Commander un fascicule et s'apercevoir ensuite qu'il ne correspond pas à vos besoins est décourageant. L' Etat manque d'argent et une des méthodes désastreuses utilisées pour financer ses services documentaires est d'avoir recours au paiement. En agissant ainsi, il dévalorise le savoir faire des organismes concernés. Si une association pouvait avoir en un clic le guide des coussins et plateaux du CERTU, elle pourrait suivre la mise en oeuvre d'un tel dispositif de ralentissement et dire au maître d'oeuvre "vous ne respectez pas le guide de bonnes pratiques du CERTU, regardez le texte, il explique que l'arête du plateau doit être franche et non arrondie, telle que vous la réalisez, elle ne ralentira pas les véhicules". Il faut accéder aux documents pdf complets gratuitement. C'est également vrai pour les normes, il est anormal de payer à l'AFNOR la norme des éthylotests électroniques. Nous sommes dans une période de transition, la production papier de ces documents doit disparaître et leur mise à disposition gratuite sous un format informatique s'impose.

La seconde exigence est d'avoir un centre de renseignement capable de diffuser les bonnes pratiques en réponse à des questions précises des maîtres d'oeuvre, des maîtres d'ouvrage, des associations et des particuliers. Si le ministre veut agir dans ce sens, qu'il demande à ses services comment une commune qui, a l'occasion d'un changement de majorité, se pose la question de la conformité à la réglementation d'une signalisation peut obtenir un avis "autorisé". A quelle adresse de messagerie du ministère doit-elle adresser sa demande ? Je peux lui produire des dizaines d'exemples : "à une intersection entre deux voies en agglomération, peut-on rendre prioritaire une seule des quatre branches et placer un stop sur les trois autres ? Si oui, quelle est la règle de priorité à appliquer lorsque deux véhicules atteignent ensemble le carrefour par des voies à angle droit entre elles  qui ont toutes les deux un panneau Stop, provenant par exemple de C et de B ou de A et de B (seule D est prioritaire) faut-il envisager une priorité à droite ou fonder la priorité sur la notion contestable d'engagement (si A s'engage, D qui vient cependant sur sa droite doit lui laisser la priorité) ?  "

3 stops et 1 voie prioritaire

Avoir une adresse internet et obtenir une réponse rapide à des questions précises de ce type serait une révolution dans la gestion de la qualité. Le besoin fondamental dans ce domaine des bonnes pratiques est la facilité d'accès rapide et gratuit à des données de qualité et à des réponses précises aux questions pertinentes posées.

TOUT CELA FAIT PARTIE DE LA TROISIEME RECOMMANDATION DU COMITE DES EXPERTS DANS SON RAPPORT DESTINE A FAVORISER L'ABAISSEMENT à 2000 DE LA MORTALITE EN 2020 : AMELIORER LA GESTION.

En fin d'année, je produirai sur ce site un bilan de la mise en oeuvre effective des 26 mesures proposées. Ce bilan accompagnera le bilan de la mortalité pour l'année 2015. Mon hypothèse est que la majorité des mesures ne seront pas effectives et que le bilan sera proche de celui de 2014, incompatible avec l'atteinte de l'objectif 2000 tués en 2020.