bilan 2019

2019 : Le gouvernement et le parlement organisent la dégradation du 80 km/h

3260 tués pendant les 12 mois s'achevant en janvier 2014 a été le niveau de mortalité sur les routes le plus bas observé depuis le début de sa décroissance en 1972. Le bilan s'est dégradé au cours des 3 années suivantes, la mortalité est remontée à 3529 en juin 2017, soit un accroissement de 269 tués. La reprise de la décroissance s'est produite en 2018 depuis l'annonce, puis la mise en oeuvre, de la limitation de vitesse à 80 km/h sur le réseau où sont observés la majorité des accidents mortels. Pendant les 12 mois s'achevant en octobre 2019, le nombre de tués a été de 3249 tués. Ce succès dans une période difficile de dégradation des radars automatiques et de réduction de la disponibilité des gendarmes et des policiers est maintenant mis en danger par l'adoption de l'amendement à la loi sur les mobilités. Il permettra de remonter à 90 km/h la vitesse maximale sur une partie des routes limitées à 80 km/h, quand les responsables départementaux décideront d'utiliser ce texte irresponsable.

J'ai analysé cette dégradation de la meilleure décision de sécurité routière adoptée depuis les réformes de 2002/2003 dans un texte publié par Le Parisien le 8 septembre 2019  et dans une analyse plus complète publiée par la Ligue Contre la Violence Routière : "La vitesse ou la vie".

Relier la notion de "bonne route" à une réduction de l'accidentalité est une conception absurde. Les routes supportant les trafics les plus importants ont été l'objet d'améliorations concernant leur largeur, la qualité de la chaussée, la rectification des courbes et l'amélioration des intersections. Ces caractéristiques incitent à une conduite rapide dépassant la vitesse maximale autorisée. En outre, l'absence de séparation des sens de circulation accroit le risque de collision de face entre véhicules lors des pertes de contrôle. Ces caractéristiques font que ces voies cumulent des nombres d'accidents très supérieurs à ceux observés sur des voies supportant des trafics beaucoup plus faibles.

Cet état de fait est incontestable. Le 23 juin 2018 j'ai publié sur ce site l'analyse de l'accidentalité départementale au niveau des voies hors agglomération non autoroutières pendant une période de 10 ans. Cette étude a été produite par un groupe limité de volontaires autour de la Ligue Contre la Violence Routière. Ils ont développé des cartes qui identifient les voies où sont observés le plus grand nombre d'accidents mortels, puisdans un second temps les cartes localisant les accidents. Elles mettent en évidence la dispertion des accidents tout au long des voies supportant des trafics importants.

Au moment où la volonté d'agir sur le réchauffement climatique devient une priorité politique affirmée, accroître la vitesse maximale sur les voies où les vitesses sont les plus élevées, donc les plus consommatrices de carburant, exprimerait une incohérence inacceptable.

J'ai commenté cette nouvelle évolution, qui devient un véritable test politique, dans un texte publié par le journal Le Monde le 20 mai 2019.

Quatre facteurs de dégradation de la sécurité routière se sont associés à l'inaptitude des décideurs :

L'entreprise de destruction de l'abaissement de la vitesse maximale à 80 km/h n'a pas été combattue par les gestionnaires de la sécurité routière au niveau où il fallait le faire et avec des méthodes adaptées. Contester la relation entre la vitesse et l'accidentalité alors que plus d'une centaine d'études ont confirmé les travaux initiaux de Nilsson est inacceptable. Un résumé de l'ONISR et des références concernant ces connaissances sont accessibles en français, ainsi que la méta-analyse d'Elvik.

La majorité des médias ont joué un rôle  majeur dans l'entreprise de dévalorisation du 80 km/h.  J'ai analysé l'émission d"Elise Lucet "envoyé spécial" du 28 février. Deux sujets ne traitant pas de l'accidentalité étaient de qualité, alors que celui concernant le 80 exploitait une masse impressionnante de mensonges et de manipulations des faits.

Une usine télévisuelle de production de documentaires à un rythme soutenu doit avoir un encadrement vigilant. Elise Lucet ne peut pas mettre cette dérive sur le dos des faussaires qui ont produit ce modèle de désinformation. Elle est responsable de ses émissions et ses phrases de présentation du 80 km/h sont sans ambiguïté :

« Les 80 km/h exaspèrent les automobilistes »

« Une contrainte de plus insupportable pour les automobilistes »

« C’en est trop pour les usagers de la route »

« 80 km/h la sortie de route »

En 1 minute 48 secondes elle contribue à la volonté de mettre à mort la décision du Premier ministre. La suite de l'émission est un déni de réalité développé avec un savoir faire évident.

J'ai rédigé trois propositions pour le grand débat, elles développaient des argumentations traitant de la sécurité routière.

Ces textes complètent mes commentaires du début de l'année.

Une lettre au Président de la République publiée le 20 janvier 2019 par le JDD (accessible au format pdf)

Une tribune le 28 décembre 2018 par Libération 110 km/h sur les autoroutes, une nécessité sous le titre : La réduction de la vitesse, seule méthode efficace pour diminuer les dépenses de carburant. Une version plus longue est accessible.

Le 2 janvier 2018 j'ai publié sur le site un ensemble de  commentaires sur l'ampleur de la désinformation

Le Sénat a créé une commission présidée par Philippe Bas et Hervé Mauret. Une analyse de la réunion de 19 sénateurs avec le délégué interministériel à la sécurité routière le 23 janvier 2018 (pdf-67 pages) a été accessible sur le site le 18 mars 2018. Elle exprime avant tout l'opposition à la décision départementale, avec des arguments qui ne sont pas conformes à l'état des connaissances accidentologiques

 Pierre Chasseray a exprimé son savoir faire habituel dans le domaine de la manipulation des faits au cours des derniers mois.